Il est communément admis que les think tanks ou « réservoir d’idées »/groupes de réflexion en français sont essentiellement le produit du monde anglo-saxon. Pensés et conçus de façon à répondre aux besoins et aux exigences de la classe politique anglo-saxonne, leur rôle dans la prise de décision politique, leur fonctionnement et leur nature complexe représentent un terrain de recherche riche qui suscite intérêt et débat. Toutefois, les recherches académiques à leur sujet n’abondent pas et peu de ressources académiques y sont disponibles.
Néanmoins, il est possible d’esquisser une définition générale des think tanks et tenter de quantifier leur impact dans le circuit décisionnel. Il est communément admis que les think tanks, indépendamment de leur structure légale, leur mode de financement et leurs domaines d’expertise, représentent un « pont entre le savoir et les politiques (publiques) »[1]. Ils ont également tous pour objectif commun d’influencer la prise de décision politique[2]. En effet, dans un monde de plus en plus complexe et interconnecté, les décideurs publics sont face à une immense quantité d’information qu’ils doivent comprendre et traiter afin de formuler des politiques publiques « rationnelles et efficaces ». Les think tanks « offrent » cette expertise pour conseiller et parfois accompagner ces décideurs. Toutefois, cette offre n’est pas structurée. Les think tanks diffèrent grandement sur de nombreux points. Ils peuvent être des structures gouvernementales, publiques ou privées et plus ou moins autonomes selon leur mode de financement. Beaucoup sont en partie ou totalement financés par les Etats et/ou des groupes d’intérêts privés compromettant ainsi leur neutralité alors que d’autres préfèrent se financer par la recherche sous contrat privé afin de profiter d’une plus grande liberté. Il convient ici de mentionner qu’indépendamment de leur niveau de neutralité, tous les think tanks ont pour trait commun la production de recherche et d’analyse scientifique de haut niveau. A ce titre, ils sont tous animés par une certaine quête de rationalité et de transparence et un souci de scientificité s’impose dans leurs activités. Si certains indicateurs nous permettent de mesurer l’efficacité des think tanks tels que la notoriété médiatique et la reprise de leurs publications par le monde académique et politique, les contacts informels jouent un rôle particulièrement important dans leur rayonnement.
De nos jours, l’industrie des think tanks est en pleine expansion dans le monde. Cette expansion apporte encore plus de complexité à ce secteur déjà fragmenté et éparse. De nouvelles formes et déclinaisons sont apparues selon leurs localisations géographiques. Les pays émergents sont un véritable marché dans lesquels de nombreux think tanks foisonnent. Dans les sociétés émergentes, ils ont pour souci commun de relever 3 défis de taille : la démocratisation et une demande toujours plus importante d’informations provenant de sources plurielles et contradictoires, la mondialisation et la modernisation technologique. En parallèle, en Amérique du Nord et en Europe Occidentale, les think tanks subissent une véritable mutation et une diversification de leurs activités.
Selon les travaux de James McGann, il est possible de classifier les principales caractéristiques des think tanks selon leur localisation géographique[3]. Deux régions nous intéressent particulièrement dans cette étude : l’Afrique du Nord/Moyen-Orient et l’Europe occidentale. Si les think tanks de la région Afrique du Nord/Moyen-Orient (MENA) se démarquent par un nombre croissant de think tanks indépendants qui peinent à survivre dans des modes de gouvernance hautement centralisées et peu démocratiques, les think tanks européens sont rarement indépendants et fréquemment caractérisés par leur affiliation aux partis politiques.
Les pays de notre étude à savoir la Turquie et la France appartiennent à ces deux aires géographiques. Cela ne les empêche pas pour autant d’être des cas atypiques au sein de leur catégorie respective. Si les deux pays se rapprochent par de nombreuses similitudes, elles se différencient également sur de nombreux points concernant le rôle et le fonctionnement de leurs principaux think tanks. Il n’a pas été aisé de dégager un axe d’analyse commun ni d’établir de conclusions tranchantes, toutefois, la faiblesse et la fragilité des think tanks sont des tendances vers lesquels les deux modèles semblent converger dérogeant ainsi au modèle de think tanks anglo-saxons « purs et parfaits ».
Origines et développement : un secteur immature
Le début des années 2000 marque l’essor simultané des think tanks en France et en Turquie. En France, selon le rapport annuel 2015 Global Go To Think Tank préparé par James McGann de l’Université de Pennsylvanie, on dénombre 180 think tanks tout secteur confondu[4] qui occupent la 6e place mondiale. Loin derrière les Etats-Unis (1800 organisations), la France a un léger retard par rapport à ses voisins européens : le Royaume-Uni et l’Allemagne occupent respectivement la 3e et 5e place mondiale avec 288 et 195 organisations recensées. Dès les années 1970, des think tanks ont commencé à émerger dans le paysage public français alors fortement imprégné par une longue tradition de clubs et de cercles politiques. En 1979, l’Institut Français des Relations internationales (IFRI) est crée. Le début des années 1990 voit la naissance de nombreuses fondations qui jouent un rôle important dans l’écosystème des think tanks de nos jours: la Fondation pour la Recherche Stratégique (FRS) en 1992, la Fondation Nicolas Hulot pour la nature et l’homme en 1990, les fondations pro-européens Robert Schuman (1991) et Notre Europe (1996) et des fondations proches des partis politiques à l’instar de la Fondation Jean Jaurès en 1992. Si leur nombre a doublé depuis le début des années 2000, une majorité d’organisations utilisant le « label » think tanks sont, en réalité, des blogs d’opinion, des plateformes d’autopromotion voire des coquilles vides[5]. Le secteur est largement dominé par les grands think tanks et l’écosystème est difficilement accessible pour les nouveaux entrants. Les think tanks français sont opérationnels dans la quasi-totalité des domaines des politiques publiques. Malgré une nette prépondérance des think tanks sur les questions internationales/européennes et stratégiques, les politiques agricoles et les enjeux autour du numérique sont également des secteurs phares dans lesquels de nombreux think tanks formulent leur expertise. Crée en 2006, l’Observatoire des think tanks structure l’industrie des groupes de réflexion français par la publication d’études sur leur fonctionnement et l’organisation d’évènements visant à évaluer leur impact dans le débat public français.
En Turquie, la situation est tout autre. Le rapport annuel 2015 Global Go to Think Tank dénombre 32 organisations de réflexion turques. Ce nombre reste très en deçà par rapport à la France et la moyenne de l’Europe Occidentale. Dans son aire régionale, la Turquie est aussi devancée par l’Iran (59 organisations), l’Israël (58 organisations) et l’Egypte (35 organisations) et se positionne à la 4e place régionale. L’extension des libertés individuelles et collectives par la Constitution de 1961 permet le foisonnement des premiers think tanks turcs. Toutefois, on constate que seul deux d’entre eux ont pu survivre jusqu’à nos jours : Ekonomik ve Sosyal Arastirmalar Vakfi (ESAM) crée en 1968 et Dis Politika Ensititusu (DPE) né en 1974[6]. La fin de la guerre froide et les négociations d’adhésion à l’Union Européenne sont à l’origine d’un renouveau des paradigmes en Turquie nécessitant de nouvelles idées et favorisent ainsi une nouvelle vague de création de think tanks dans les années 1990. Ceux-ci comptent aujourd’hui parmi les principaux et les plus influents : TESEV (Turkiye Ekonomik ve Sosyal etutler Vakfi), SAM (Stratejik Arastirmalar Merkezi) et ARI Hareketi. Le reste des 32 organisations actuelles ont été crée pendant les années 2000 et 2010 avec pour certains une ascension remarquable dans le paysage politique. Les thèmes de travail des think tanks majeurs en Turquie sont largement dominés par les relations internationales et stratégiques, l’adhésion à l’Union Européenne, les politiques économiques, la réforme de la Justice et la bonne gouvernance à l’échelle locale et nationale. Ces think tanks s’établissent sous la forme d’associations ou de fondations. Cela facilite le financement de ses structures car les donations sont en grande partie déductible des impôts.
Des think tanks majeurs encore peu indépendants à l’influence mitigée
Le retard des deux pays dans l’adoption, le développement et le renforcement du concept de think tank s’explique par des dynamiques internes qui leurs sont propres. Néanmoins, la longue tradition jacobine des affaires publiques turques et françaises est une constante commune qui explique en grande partie ce retard. Elle est aussi déterminante dans la définition, le rôle particulier et le fonctionnement que ces deux pays accordent aux think tanks dans leur sphère politique respective.
Le cas de la France : entre distance et dépendance
En France, la méfiance et la faiblesse des think tanks ne témoignent pas nécessairement d’un désengagement de l’Etat à l’égard de l’expertise scientifique. L’Etat français a toujours entretenu une relation très étroite, privilégiée et souvent de tutelle avec le Centre National de Recherche Scientifique (CNRS) et les grands centres de recherches scientifiques. Cette méfiance vis-à-vis des think tanks provient avant tout du financement privé de ces derniers et de la notion d’intérêt général à la française où l’Etat occupe une place centrale. Contrairement à l’Allemagne et la Grande-Bretagne où les financements privés garantissent une certaine indépendance des idées face à l’Etat, ces derniers n’ont pas la même connotation en France où l’appareil étatique symbolise encore fortement l’indépendance vis-à-vis des groupes d’intérêts/lobbies et l’intérêt général. A cela s’ajoute également une vision prépondérante de l’élite politique omnisciente issue des grandes écoles, et la connotation très péjorative des groupes d’influences dans la culture politique française. Dans cette configuration, les think tanks sont alors suspectés de promouvoir les intérêts d’un groupe privé trop souvent associé à une certaine classe économique et industrielle. Si cette vision négative relève en partie de préjugés, il n’empêche pas pour autant que l’Etat entretient des relations ambigües et parfois clientélistes avec certains think tanks que l’on peut aisément définir comme des « advocacy think tanks ». En réalité, l’émergence des think tanks en France comme dans le monde occidental se justifie et participe d’une nouvelle tendance de gouvernance politique. Face à une dépolitisation croissante des partis politiques[7], le personnel politique est de plus en plus confiné à un rôle de « gestionnaire » et non plus de « programmateur » de l’action publique. Dans ce nouveau modèle, la société civile est une composante forte de la gouvernance politique avec toutes ses parties prenantes : associations, think tanks, lobbies etc. Bien que la France soit engagée dans cette transformation, le chemin reste encore long et le rôle exercé par les think tanks reste donc limité.
Les principaux think tanks français peuvent être classifiés selon différentes catégories. M. Monange identifie trois groupes de think tanks français : les think tanks institutionnels, les think tanks politiques et les think tanks rattachés à des organismes universitaires (connus sous la dénomination « d’universités sans étudiants »).
Parmi les think tanks institutionnels, y figurent des organisations principalement spécialisées sur les questions stratégiques et les relations internationales. L’Institut Français des Relations Internationales (IFRI), l’Institut de Relations internationales et stratégiques (IRIS) ainsi que la Fondation pour la Recherche Stratégique focalisent leur travail sur la critique et la formulation des politiques publiques en matière de politique étrangère et de défense. Ils sont, dans le même temps, des organisations au budget le plus important et le plus dépendant de l’Etat. Le budget de l’IFRI s’élève à six millions d’euros dont 1,5 million d’euros en subventions versés par l’Etat. De même, la FRS bénéficie d’une subvention de 1,5 million d’euros pour un budget total de 4,1 millions d’euros. Quand à l’IRIS, les subventions versées par l’Etat sont d’un montant plus faible : elles s’élèvent à 300 000 euros pour un budget total de 3 millions d’euros. Dans cette catégorie, il est également possible de mentionner les grands think tanks pro-européens : la Fondation Robert Schuman et Notre Europe. Ces fondations reposent encore plus fortement sur les subventions de l’Etat. L’Etat français verse 1,4 million d’euros de subventions à la Fondation Robert Schuman pour un budget total de 1,9 millions d’euros et 540 000 euros pour Notre Europe dont le budget avoisine 1,4 millions d’euros. Ces think tanks bénéficient également d’une relation très étroite avec l’appareil de l’Etat. En effet, une étude détaillée sur la genèse et le développement de ces think tanks nous éclaire sur leurs modes d’action. Crées pour répondre à un « effet de mode » porté par la réussite des think tanks anglo-saxons, « l’émergence de think tanks internationalistes et spécialistes des questions de défense s’apparente en effet à une forme de création institutionnelle pilotée par la puissance publique plutôt qu’incitée par un mouvement d’affirmation d’une société civile pluraliste »[8]. Une relation de type instrumental s’est donc instaurée entre les décideurs publics et les scientifiques conduisant à l’institutionnalisation de l’expertise qui produit de l’information à disposition des décideurs. Ce mouvement mondial d’externalisation de l’expertise couplé à une opinion publique en quête de toujours plus de transparence et de débat créent donc une dépendance forte des décideurs vis-à-vis des think tanks. De l’autre côté, ces grands think tanks ont besoin de la reconnaissance de l’appareil étatique pour exercer pleinement leur rôle. Cette fragilité institutionnelle pousse les think tanks français à se questionner sur leur reconnaissance, leur identité et leur raison d’être et à élaborer diverses stratégies afin d’assurer in fine leur pérennité. L’IFRI cultive une identité ambiguë : tantôt elle se réclame d’une proximité vis-à-vis de la puissance publique qui lui profère le prestige de participer à la définition de la politique étrangère de la France, tantôt elle se distancie de celle-ci arguant pour sa recherche libre et indépendante. L’IFRI prétend également être un lieu de rencontre des entreprises multinationales et de la classe politique. En réalité, cette identité pensée davantage à proximité des lieux de pouvoirs politiques et économique exclut presque naturellement la dimension académique et la production de savoirs libres et indépendants de l’Institut. Dans la même veine, l’IRIS, ancrée davantage à gauche de l’échiquier politique et en dépit de ses efforts pour se démarquer dans le paysage des think tanks français, mène une stratégie tous azimuts en se définissant à la fois comme une université en relations internationales, structure de conseil, éditeur et organisme de recherche académique. Cette diversification du champ d’action des principaux think tanks français va plus loin que ses homologues anglo-saxons sans pour autant démontrer leur efficacité. Quant à la Fondation pour la Recherche stratégique, malgré l’affirmation de son statut à part entière, celle-ci repose beaucoup trop sur les subventions étatiques, à l’origine de son inconfort intellectuel.
Un nombre non-négligeable des principaux think tanks français sont qualifiés de « think tanks politiques ». Officiellement ou officieusement crées et soutenus par un parti ou un leader politique, ces think tanks sont souvent des fondations qui sont apparus à partir des années 2000. A gauche, la Fondation Jean Jaurès et Terra Nova sont de puissants think tanks proches du parti socialiste. Toutefois, ces deux think tanks se différencient par leur mode de financement. Si la Fondation Jean Jaurès repose en très grande partie sur les subventions publiques (67% du budget total), Terra Nova tire principalement ses revenus du mécénat des entreprises (80% du budget total). A droite, la Fondation pour l’Innovation Politique ou Fondapol est principalement financé par des fonds publics (73% de son budget total) et placé sous la houlette du Conseil des Clubs et de think tanks crée par Jean-François Copé pour rassembler les think tanks proches de la droite politique. Ces think tanks jouent un rôle primordial sur les thèmes de travail de chaque parti notamment en vue de la préparation des échéances électorales. Dans un article du Monde publié en janvier 2011, les think tanks rattachés à droite aurait été sollicités pour travailler sur des thèmes tels que la compétitivité et les trente-cinq heures, la laïcité et la justice sociale. En 2012, Terra Nova a mené un travail d’évaluation du volet recettes du programme du candidat François Hollande[9]. Surtout, Terra Nova a mené un travail décisif sur l’instauration des primaires au Parti Socialiste. Ce rôle « d’assistance » des grands think tanks français aux partis politiques s’explique en majeure partie par la faible adhésion des français aux partis politiques. Quand les partis politiques anglais et allemand enregistrent un nombre d’adhérents supérieurs au million, lés adhérents des partis politiques français se compte en quelques centaines de milliers. Cette faible adhésion est révélatrice d’une crise de refonte de l’innovation et de la politique de l’intérieur de ces structures. Les grands think tanks remplissent donc ce rôle « de l’extérieur », aidés par leur discours visant la neutralité et la « scientificité », ils participent à l’innovation des politiques publiques plus inclusive vis-à-vis de la société civile.
La dernière catégorie de think tanks français majeurs est celle des think tanks universitaires. Le Centre de Recherches Internationales (CERI), une unité mixte de recherche commune à Sciences Po et au CNRS, est un exemple typique. La dimension de la recherche académique y prévaut mais ces institutions sont souvent proie à la tension entre recherche académique et expertise.
Les think tanks turcs : la polarisation sur un autre terrain
En Turquie, les raisons du retard sont avant tout et essentiellement de nature politique. Bien que réducteur, nous pouvons, dans un premier temps, évoquer l’argument culturel non pas dans un sens culturaliste mais comme un comportement hérité par une tradition politique. En effet, l’explication culturelle est la conséquence de l’autoritarisme du système politique turc depuis les débuts de la République de Turquie. Dans un tel contexte autoritaire, une véritable tradition de l’esprit critique n’a pu s’installer au sein de la société et du monde universitaire et de la recherche. Déjà peu imprégnée de cette culture de la critique et victime d’un cercle vicieux, l’environnement politique n’a cessé d’entraver l’expression libre des idées jusqu’à nos jours. Le foisonnement et le renforcement des think tanks turcs ont donc toujours été le corollaire d’un espace plus ou moins grand du respect de la liberté d’expression, de réunion et d’association mais aussi de l’ouverture du pays sur le monde. Les périodes d’ouverture démocratique et de pluralisme en Turquie ont vu une libération de la parole publique au détriment du monopole de l’Etat et de son corps bureaucratique créant ainsi un espace public où la société civile a pu réagir de manière énergique et constructive aux débats. Dans ce cadre, les think tanks représentent une plateforme d’expression importante de cette société civile foisonnante. Le caractère cyclique de l’autoritarisme en Turquie entre des périodes d’ouverture et de renfermement démocratique explique la faible espérance de vie des think tanks turcs dont l’écrasante majorité exerçant leurs activités de nos jours ont moins de quinze années d’existence. De nombreux think tanks n’ont donc pas pu survivre aux aléas démocratiques du pays, sont apparus puis ont disparu de l’espace public après quelques années d’activité. Aujourd’hui encore, principaux think tanks compris, la quasi-majorité de ces organismes sont privés d’une situation politique et financière viable. Cela a donc amené plusieurs analystes à s’accorder sur le fait que le secteur des think tanks en Turquie est un secteur « start-up » et, de ce fait, hautement incertain.
La dernière des brèches démocratiques en Turquie fut ouverte dans les années 2000. C’est dans cette période qu’une très grande majorité des think tanks actuels ont vu le jour notamment sous l’impulsion des cadres et des intellectuels affiliés à l’AKP (Parti de la Justice et du Développement). Ahmet Davutoglu, ancien premier ministre turc (2014-2016) d’origine universitaire, avait souligné dès 2001 la nécessité de créer un plus grand nombre de think tanks comme source de nouvelles idées politiques avant même l’arrivée au pouvoir de l’AKP. En 2013, le premier ministre Erdogan avait encouragé les cadres du gouvernement à s’impliquer dans la création de think tanks pour « promouvoir les politiques publiques turques au reste du monde ». On voit donc que le développement des think tanks répondent à des objectifs diverses et contradictoires : représenter les politiques du gouvernement, élaborer de nouvelles idées réformatrices du système politique turc ou représenter la société civile dans l’espace public et dans le champ de l’expertise scientifique. La typologie utilisée pour analyser les grands think tanks français est pertinente mais insuffisante pour le cas de ses homologues turcs. La typologie effectuée par Chris Game complète la précédente. Game classifie les think tanks britanniques, indépendant et sans lien avec un quelconque parti politique, selon une échelle d’indépendance officieuse vis-à-vis du gouvernement et des partis politiques, proximité principalement évaluée par des contacts informels. Il mesure selon cette échelle la puissance exercée par un think tank dans son paysage politique. Une étude approfondie nous montre qu’un nombre non-négligeable d’organisations créées dans les années 2000-2010 sont très étroitement liées au gouvernement et donc indirectement à l’AKP compte tenu de son emprise sur l’appareil de l’Etat. Des think tanks majeurs comme SETA (Siyaset, Ekonomi ve Toplum Arastirmalari Vakfi) et EDAM (Ekonomi ve Dis Arastirmalar Merkezi) crées en 2008 et TASAM (Turk Asya Stratejik Arastirmalar Merkezi) en 2003 formulent des politiques publiques, conseillent le gouvernement et relayent ses politiques à l’opinion publique turque et à l’étranger. A l’opposé, des think tanks à l’instar de TEPAV et USAK crées en 2004 et de TESEV en 1994 ont une action plus éloignée du gouvernement et de l’AKP avec une inclinaison plus libérale. En réalité, comme l’affirme très justement Jeffrey Collins, les think tanks turcs, notamment les principales organisations du pays, servent de relais des différents segments rivaux d’une société et d’un système politique hautement polarisé. Les think tanks ont rapidement été perçus par les nombreuses composantes de la société turque comme un moyen efficace pour agir sur l’élaboration de politiques publiques et la formation de l’opinion publique et pour disséminer et plaider pour leurs positions politiques. De nombreux mouvements sociaux, politiques et identitaires voire des communautés religieuses ont investis le terrain par la création de leur propres think tanks. C’est alors que nous avons assisté à une véritable expansion spatiale et une diversification du fonctionnement selon les affinités/sensibilités de chacun. Dans ce contexte polarisé et indépendamment des questions de financement, les principaux think tanks turcs sont donc souvent affiliés à un parti, une idéologie ou un mouvement politique. Toute personne familière au paysage des think tanks turcs peut aisément identifier la tendance ou l’affiliation politique de chaque organisation. Ainsi, TEPAV est fortement lié à la Chambre de Commerce turque alors que TESEV se revendique kémaliste et pro-européen. Entre deux, USAK suit une voie modérée entre positions nationalistes et libérales dans l’analyse de la politique étrangère turque. Cette identité dissimulée est paradoxalement assumée par les acteurs. Selon Hatem Efe de SETA, « tous les think tanks ont une position politique » en avertissant que « l’intellectuel mixe savoir et engagement politique tout en empêchant que le savoir produit soit confiné aux limites de cet engagement ». Enfin, depuis quelques années, les think tanks servent de moyen pour le gouvernement afin de court-circuiter la fonction publique turque dont l’indépendance et l’intégrité ont été régulièrement mises à l’épreuve. L’exécutif n’hésite pas à collaborer davantage avec les think tanks notamment proches de l’AKP face à un corps de fonctionnaire dont les divisions internes et l’allégeance au gouvernement a fait l’objet de nombreux débats.
Le mode de fonctionnement des principaux think tanks turcs présente des similarités importantes. Ils ont pour activité principale de préparer des rapports et des études et d’organiser des séminaires, des colloques et des conférences. Le fruit de leurs travaux est souvent publié en ligne et/ou dans des revues créées à leur initiative, des livres ou des brochures. Les grands think tanks au statut d’association, à l’instar de KA-DER travaillant principalement sur la place de la femme dans la société, organisent des campagnes de sensibilisations à destination du grand public et des hommes politiques. Des réunions informelles avec les décideurs politiques sont régulièrement organisées.
A l’instar de ses homologues français, la question du financement est également est un enjeu délicat pour les think tanks turcs. Comme en France, l’appareil étatique et la recherche académique ont joué un rôle très important dans le développement de ce secteur. Leur emprise est donc considérable. Trop souvent, les grands think tanks turcs fonctionnent avec de petits budgets peu transparent et difficilement accessible au public. Leurs financements proviennent de sources diverses: subventions étatiques, donations individuelles, profits générés par la production intellectuelle etc. A titre d’exemple, SETA génèrent 40% de son budget par la vente de ses publications. Les think tanks très étroitement liés au monde des affaires tels que TEPAV ou IKV et aux différents organes gouvernementaux à l’instar de SAM (Stratejik Arastirmalar Merkezi) bénéficient des moyens importants. Toutefois, qu’ils reposent sur le monde des affaires ou l’Etat, la question de l’indépendance et de la liberté intellectuelle ne va pas sans problèmes. Trop souvent, les entreprises donateurs sont dans l’obligation de maintenir de bonnes relations avec les pouvoirs publics. Cela a un impact indéniable sur la production intellectuelle des think tanks financés par ces entreprises, qui reste donc fragile : la très grande majorité de think tanks ne prennent le risque de critiquer les politiques publiques en place notamment lors de l’ouverture d’importants marchés publics, par crainte de porter préjudice aux activités de leurs sponsors. Quand à ceux qui prennent ce risque, rare sont ceux qui formulent des alternatives constructives de politiques publiques. Autre risque constitue le caractère aléatoire des donations. L’exemple de l’ASAM (Ankara Stratejik Arastirmalar Merkezi), un des principaux think tanks turc dans les années 2000, révèle parfaitement cette situation. Principalement financé par le grand groupe industriel Ulker, ASAM a mis fin à ses activités suite au retrait du soutien financier du groupe. C’est pourquoi, de plus en plus, les grands think tanks se tournent vers des sources de financements internationaux notamment européens et vers la mise en œuvre de projets financés par des bailleurs étrangers.
Enfin, la fermeture de la dernière brèche démocratique et l’autoritarisme grandissant en Turquie sont à l’origine de nombreuses discriminations du gouvernement envers les principaux think tanks qui se situent loin de sa ligne politique. Si ces derniers continuent d’exercer leurs activités, ils sont néanmoins relégués aux marges du paysage public par l’exécutif au profit des think tanks proches de l’AKP à l’instar de SETA ou de TASAM. Ural Akuzum de Ari Hareketi, think tank indépendant, affirme à juste titre que le gouvernement ne porte pas préjudice à leurs activités mais déplore la trop grande complicité qu’il entretient avec les organismes de réflexion proches de l’AKP.
Un impact sur la vie politique difficilement quantifiable
Le constat semble le même concernant le rôle et le fonctionnement des principaux think tanks français et turcs. En crise d’indépendance et d’identité, les principaux think tanks français et turcs peinent à s’imposer dans leur paysage politique comme des structures libres à part entière. Peu indépendant face à l’appareil étatique, ces grands think tanks entretiennent également des relations ambigües avec les politiques. Une relation trop étroite avec les partis politiques en France et les aléas de la démocratisation en Turquie compromettent leur bon fonctionnement et le plein accomplissement de leur rôle. Bien qu’il soit difficile de quantifier l’impact de l’influence exercé par les think tanks dans le monde, on peut aisément affirmer que les cas turc et français sont bien loin de l’image « pure et parfaite » des grands think tanks anglo-saxons qui rayonnent par leur nombre important et leur puissance d’influence.
Ce rôle limité ne va pas sans une certaine efficacité. Ainsi comme l’affirme le député socialiste Laurent Baumel, le rôle premier des think tanks, majeurs comme mineurs, est d’intervenir et d’orienter le débat public et politique. Elle exerce par ce biais une fonction intellectuelle collective de réflexion prospective politique de moyen et long terme[10]. Dans cette configuration, le dernier mot revient toujours aux décideurs politiques et à l’usage qu’ils feront des éléments de ce débat. Le système politique est donc d’une importance cruciale. En effet, la Turquie et la France présentent des similarités importantes dans leur système politique et leur processus décisionnel. Régime semi-présidentiel où le Président de la République et son parti au pouvoir (hors cohabitation et coalition) dirigent en grande partie les affaires politiques, la figure du Président et de son entourage est la cible des think tanks en quête de reconnaissance et d’influence. M. Baumel rappelle alors à juste titre que les politiques sont rarement sous l’influence des idées provenant notamment de sources externes malgré les contraintes temporelles qui leur sont imposées. En dépit de l’attrait que suscite les idées neuves obéissant aux logiques rationnelles et scientifiques produites par les grands think tanks, la vraie question est donc de savoir dans quelle mesure la fonction politique est connectée à la fonction intellectuelle. Ibrahim Kalin, actuel conseiller du Président de la République de Turquie et fondateur de SETA, rappelle que l’adhésion d’une idée par l’opinion publique et la préservation de l’intérêt général sont les conditions sine qua non de l’adoption d’une idée formulée par un think tank. « Quand une analyse de politique étrangère nous parvient et si celle-ci nous convainc, nous l’étudions, parfois au plus haut niveau » en ajoutant qu’il est « impossible de mettre en œuvre une politique dépourvu du soutien de l’opinion quand bien même elle serait cent pour cent juste ». Il souligne la nécessité d’un travail pédagogique auprès de l’opinion publique en faveur d’une idée portée par un think tank et approuvé par les hommes politiques. On constate donc une certaine appétence de la classe politique au savoir produit par les grands think tanks mais la décision in fine revient toujours à ces derniers. Enfin, des phénomènes de revolving door sont également fréquents. Des représentants de think tanks majeurs, souvent proches des partis politiques, ont pu trouver leur place dans des cabinets ministériels et présidentiels. De nombreux représentants de Terra Nova ont ainsi pu intégrer des cabinets ministériels sous les gouvernements socialistes. En Turquie, Etyen Mahcupyan, conseiller à TESEV, a été nommé premier conseiller de l’ancien Premier Ministre turc Ahmet Davutoglu. Plus emblématique encore, Ibrahim Kalin[11], co-fondateur de SETA, est un proche et fidèle conseiller de Recep Tayyip Erdogan depuis plusieurs années déjà et l’a accompagné dans l’exercice de ses diverses fonctions en tant que Premier Ministre et Président de la République.
Médias et opinion publique : un rôle grandissant
L’avènement de l’ère des médias de masse a favorisé une nouvelle définition du rôle des think tanks majeurs en France et en Turquie. Il n’est pas anodin que les années 1990 à l’origine des principaux think tanks turcs coïncident à l’ouverture du pays à la pluralité médiatique. Les think tanks assument désormais un rôle de formation de l’opinion publique à la fois comme une fin en soi et un moyen d’augmenter leur influence auprès des décideurs publics.
Pour Olivier Vilain, en France, ce processus se fait en plusieurs étapes. Il souligne d’abord que les principaux think tanks forment un consensus souvent néolibéral et ouvre ainsi la focale du débat sur un problème de société[12]. Ils alimentent toutes les parties prenantes de ce débat à savoir l’élite journalistique, politique et économique et conditionnent ainsi les résultats des discussions. M. Vilain parle alors des problèmes que les think tanks formatent auxquelles ils « apportent des solutions toutes formatées ». En parallèle, les médias relayent de plus en plus les rapports, notes et études des grands think tanks et leurs représentants sont présentés comme expert et invités pour animer des débats télévisés dont Dominique Reynié de Fondapol est le personnage le plus emblématique. Dans une étude recensant le nombre de citations émanant des grands think tanks repris par la presse écrite, Vilain affirme que ce nombre est passé d’une dizaine de fois en 2005 à plus d’une centaine en 2012. Enfin, les think tanks majeurs mènent un travail de communication pédagogique auprès de la société civile sur les grandes réformes politiques. En 2011, inspiré des élections américaines, Terra Nova a massivement utilisé les médias pour convaincre l’opinion publique sur l’utilité d’une primaire à gauche. Aujourd’hui, les primaires se sont ancrées dans la vie politique française, à gauche comme à droite de l’échiquier politique.
En Turquie, le constat est le même : les principaux think tanks sont en quête permanente de visibilité médiatique. Toutefois contrairement à la France, une grande visibilité médiatique n’est pas toujours le corollaire d’un impact important auprès des décideurs publics. Trop souvent, les think tanks proche de l’élite politique à l’instar de SETA n’ont pas besoin d’une exposition médiatique conséquente. Leurs contacts informels avec les membres du gouvernement leur permettent d’exercer une influence notable sur le circuit décisionnel. Les représentants de ces think tanks font généralement leur apparition dans des médias proches de l’AKP ou la chaine publique du TRT afin d’effectuer un travail de pédagogie et de promotion des choix gouvernementaux auprès de l’opinion publique. A l’opposé, apparaître dans les débats télévisés et publier des chroniques dans les plus grands journaux revêt une toute autre importance pour les think tanks indépendants loin de l’AKP. Ils espèrent ainsi donner une meilleure visibilité au produit de leur travail de recherche, apporter une alternative critique aux politiques gouvernementales et ouvrir le champ du débat afin de réaliser une communication pédagogique auprès de l’opinion publique dans l’objectif d’impacter indirectement le travail du gouvernement. Toutefois, il convient de mentionner que cette parole n’est pas entièrement libre notamment dans le cas des médias audiovisuels. La télévision est un média puissant à travers lequel se forge les représentations collectives de l’opinion publique turque. Dans des moments d’autoritarisme, les médias visuels sont les premiers à souffrir des restrictions des libertés qui prennent souvent la forme de l’autocensure. Dans ces périodes, les think tanks indépendants peinent à faire entendre leurs voix. Relégués et privés de visibilité publique, leur influence sur l’opinion publique et les décideurs politiques reste donc moindre.
Conclusion
Les principaux think tanks français et turcs présentent des similarités notables et de nombreuses divergences. Soumis à des contraintes similaires de nature financière et politique, ils réagissent, s’adaptent et évoluent dans leur environnement politique respectif. Quand les think tanks français peinent à se distancier de l’appareil étatique et des partis politiques, les think tanks mènent une stratégie de survie face à un environnement politique de plus en plus hostile à l’expression libre des idées et des discours critiques.
Hilal Kozan, pour l’IRPAM
Bibliographie
- Think Tanks. Briefing Paper Special Issue | September 2011. CONTENT. Foreword. 3. I. Do We Need More and More Think Tanks? Rudolf Traub-Merz. 4. II
- James G.McGann, « 2015 Global Go To Think Tank Index Report » (2016). TTCSP Global Go To Think Tank Index Reports. Paper 10. http://repository.upenn.edu/think_tanks/10
- A. Celik, Dusunce kuruluslari ve etkileri, « Konya Ticaret Odasi Arastirmalar Merkezi », KONYA, Ocak 2016 – http://www.kto.org.tr/d/file/dusunce-kuruluslari-ve-kto-sam—ahmet-celik.pdf
- L. Desmoulins, « Le rôle des think tanks dans les processus de décision de politique extérieure analyse comparée, Etats-Unis, Royaume-Uni, France [Texte imprimé] : les limites de « l’import-export institutionnel », le modèle d’expertise anglo-saxon incarné par les think tanks français internationalistes et spécialistes des questions de défense » / thèse sous la direction de Véronique Richard, 2 vol. (576 p.), 2005
- Les think tanks servent-ils à quelque chose en France ?, entretien publié sur Antlatico.fr par Olivier Urrutia, Juillet 2016 – http://www.oftt.eu/607
- Quel rôle jouent les « think tanks » dans la vie politique ?, par Marie-Anne Kraft, 11 nov. 2009 – https://blogs.mediapart.fr/marie-anne-kraft/blog/111109/quel-role-jouent-les-think-tanks-dans-la-vie-politique
- A quoi servent les think tanks ?, Reportage réalisé par France Culture, 14 décembre 2012, http://www.franceculture.fr/emissions/pixel-13-14/quoi-servent-les-think-tanks
- « Düşlüyor, düşünüyor ve karar aldırıyorlar » par Cansu Camlibel, 22 mai 2011, http://www.hurriyet.com.tr/dusluyor-dusunuyor-ve-karar-aldiriyorlar-17844234
- B. Findikli, The Emergence of think tanks and médiator intellectuals in Turkey, thèse soumise au Graduate School of social sciences of Istanbul Sehir University – http://earsiv.sehir.edu.tr:8080/xmlui/bitstream/handle/11498/25112/000110695002.pdf?sequence=1
- R.H.M Outzen R. Schiwng, Supporting Democracy in Erdogan’s Turkey: The Role of Think Tanks, Forum 292 (May 2016): 1-15.
- A. Longhini, The role and the influence of think tanks on the policy-making process inEurope. France and Italy’s case studies in comparison with the US, London School of Economics – The European Graduate Network Conference 2013, 25-27 March
[1] Think Tanks. Briefing Paper Special Issue | September 2011. CONTENT. Foreword. 3. I. Do We Need More and More Think Tanks? Rudolf Traub–Merz. 4. II
[2] Idem
[3] McGann, James G., « 2015 Global Go To Think Tank Index Report » (2016). TTCSP Global Go To Think Tank Index Reports. Paper 10. http://repository.upenn.edu/think_tanks/10
[4] Think Tanks. Briefing Paper Special Issue | September 2011. CONTENT. Foreword. 3. I. Do We Need More and More Think Tanks? Rudolf Traub–Merz. 4. II
[5] Interview avec Olivier Urrutia: Les think tanks servent-ils à quelque chose en France – http://www.oftt.eu/607
[6] A. CELIK, Dusunce kuruluslari ve etkileri, « Konya Ticaret Odasi Arastirmalar Merkezi », KONYA, Ocak 2016 – http://www.kto.org.tr/d/file/dusunce-kuruluslari-ve-kto-sam—ahmet-celik.pdf
[7] Interview avec Olivier Urrutia: Les think tanks servent-ils à quelque chose en France – http://www.oftt.eu/607
[8] Desmoulin Lucile, Le rôle des Think Tanks dans les processus de décision de politique extérieure : analyse comparée, Etats-Unis, Royaume-Uni, France – http://www.paris-sorbonne.fr/article/le-role-des-think-tanks-dans-les
[9] L’évaluation se trouve ici : http://tnova.fr/notes/programme-de-francois-hollande-evaluation-du-volet-recettes
[10] extrait de l’interview réalisé par France Culture avec Laurent Baumel
[11] « Düşlüyor, düşünüyor ve karar aldırıyorlar » par Cansu Camlibel, 22 mai 2011, publié par Hurriyet http://www.hurriyet.com.tr/dusluyor-dusunuyor-ve-karar-aldiriyorlar-17844234
[12] extrait de l’interview réalisé par France Culture avec le journaliste Olivier Vilain